A) L’articulation
Comme l’explique Clive Brown, il existait au milieu du XVIIIe siècle un type d’exécution normale supposant une articulation plus marquée que celle qui était la norme au milieu du XIXe siècle. [1] C’est, entre autres, le type d’articulation qu’implique la description de Türk : « For tones which are to be played in customary fashion (that is, neither detached nor slurred) the finger lifted a little earlier from the key than is required by the duration of the note. » [2] Un seul commentaire pourrait laisser clairement supposer qu’un tel type d’articulation ait pu être admis chez les guitaristes en France de la fin du XVIIIe siècle. Lorsqu’il décrit la technique de production du son de la main droite dans sa méthode, Trille LaBarre affirme, en effet, que le « pincé doit être sec afin que les sons en soient mieux détachés ». [3] Sa description du staccato est différente : « Le détaché tout à fait bref et sec, se marque par des points sur les notes. » [4] Doisy est beaucoup moins clair dans son commentaire sur le détaché : « Le détaché est une suite de notes qui doivent être absolument déliées. C’est ordinairement le pouce et le premier doigt de la main droite dont on se sert alternativement pour cela. Comme il est fort difficile à exécuter, il ne s’emploie guère que dans les mouvements modérés. » [5] Pour les guitaristes du début du XIXe siècle, comme Doisy et LaBarre, le terme « détaché » semble être souvent employé comme terme opposé à « lié » ou « coulé » plutôt que comme synonyme de « staccato ». Par exemple, lorsqu’il explique le détaché, Lintant semble seulement faire référence à l’exécution d’une gamme où les notes ne sont pas liées (ex. 1). En 1825, Carpentras utilise la même formule que Lintant. [6]